DI U RITUNDU

During times of universal deceit, telling the truth becomes a revolutionary act. George Orwell

jeudi 3 avril 2008

D'une cause si belle il faut souffrir l'effet





CORNEILLE




Corneille (1606 – 1684),


Horace (1640)

Horace ? Quel beau texte ! Quelle noblesse ! Quelle démesure ! Du grand Corneille...

Goûtez sans plus tarder :













Le romain Horace vient de vaincre pour Rome en tuant les trois frères Curiace.
Mais Camille, soeur d'Horace et fiancée à l'un des Curiace, ne peut se réjouir du triomphe de sa patrie car elle lui coûte la vie de son aimée.
Elle maudit Rome !
Horace pris de fureur, la tue...
Le héros devient donc criminel et le Roi de Rome, Tulle, doit ici juger...











TULLE (Roi de Rome) :

Valère, c'est assez :
Vos discours par les leurs ne sont pas effacés ;
J'en garde en mon esprit les forces plus pressantes,
Et toutes vos raisons me sont encor présentes.

Cette énorme action faite presque à nos yeux
Outrage la nature, et blesse jusqu'aux dieux.

Un premier mouvement qui produit un tel crime
Ne saurait lui servir d'excuse légitime :
Les moins sévères lois en ce point sont d'accord ;
Et si nous les suivons, il est digne de mort.

Si d'ailleurs nous voulons regarder le coupable,
Ce crime, quoique grand, énorme, inexcusable,
Vient de la même épée et part du même bras
Qui me fait aujourd'hui maître de deux états.

Deux sceptres en ma main, Albe à Rome asservie,
Parlent bien hautement en faveur de sa vie :
Sans lui j'obéirais où je donne la loi,
Et je serais sujet où je suis deux fois roi.

Assez de bons sujets dans toutes les provinces
Par des voeux impuissants s'acquittent vers leurs princes ;
Tous les peuvent aimer, mais tous ne peuvent pas
Par d'illustres effets assurer leurs états ;
Et l'art et le pouvoir d'affermir des couronnes
Sont des dons que le ciel fait à peu de personnes.

De pareils serviteurs sont les forces des rois,
Et de pareils aussi sont au-dessus des lois.

Qu'elles se taisent donc ; que Rome dissimule
Ce que dès sa naissance elle vit en Romule :
Elle peut bien souffrir en son libérateur
Ce qu'elle a bien souffert en son premier auteur.

Vis donc, Horace, vis, guerrier trop magnanime :
Ta vertu met ta gloire au-dessus de ton crime ;
Sa chaleur généreuse a produit ton forfait ;
D'une cause si belle il faut souffrir l'effet.

Vis pour servir l'état ; vis, mais aime Valère :
Qu'il ne reste entre vous ni haine ni colère ;
Et soit qu'il ait suivi l'amour ou le devoir,
Sans aucun sentiment résous-toi de le voir.

Sabine, écoutez moins la douleur qui vous presse ;
Chassez de ce grand coeur ces marques de faiblesse :
C'est en séchant vos pleurs que vous vous montrerez
La véritable soeur de ceux que vous pleurez.

Mais nous devons aux dieux demain un sacrifice ;
Et nous aurions le ciel à nos voeux mal propice,
Si nos prêtres, avant que de sacrifier,
Ne trouvaient les moyens de le purifier :
Son père en prendra soin ; il lui sera facile
D'apaiser tout d'un temps les mânes de Camille.

Je la plains ; et pour rendre à son sort rigoureux
Ce que peut souhaiter son esprit amoureux,
Puisqu'en un même jour l'ardeur d'un même zèle
Achève le destin de son amant et d'elle,
Je veux qu'un même jour, témoin de leurs deux morts,
En un même tombeau voie enfermer leurs corps.
.





L'action historique des héros ou des hommes d'exception se situe au-dessus de la vie du commun des mortel. L'action des héros n'est pas inscrite dans le cours ordinaire des choses... Si leur destin est exceptionnel (extra-ordinaire) le bonheur n'est pas leur lot...
Grandeur et misère des êtres d'exception !

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